Les fêtes et les chants de la révolution française

LA FÊTE DE L'ÊTRE SUPRÊME. 459

deux côtés de l'allée, le terrain qui entoure le bassin était réservé aux 2 100 délégués des sections formant les groupes de mères, jeunes filles, vieillards, adolescents, enfants. Ceux-là, nous les connaissons déjà : c'est à eux articulicrement que les professeurs du Conservatoire sont allés, la veille, prodiguer leurs conseils. Les commissaires distribuent à tout le monde les strophes, les fleurs, les branches de chêne : au sein même de la Convention, chaque représentant recoit un bouquet d'épis de blé, de fleurs et de fruits; on n’a garde d'omettre les strophes, car il faudra bien que tous fassent leur partie dans le concert. Dans les cathédrales, les chanoines, abbés, vicaires, ne chantent-ils pas au chœur, après que l’officiant leur a donné l’intonation ? Et les membres de la Convention, ayant décrété l’Étre sauprème, ne sont-ils pas aujourd'hui ses prètres, ayant en avant d'eux Robespierre, qui pontifie? ‘

Au milieu du bassin avait été érigée, d’après une esquisse de David, une statue de la Sagesse, provisoirement recouverte par des oripeaux représentant le monstre de l’Athéisme. Des portiques garnis de guirlandes de fleurs et de feuillage étaient élevés à toutes les entrées du jardin; des inscriptions < consolantes pour les peuples, terribles pour les despotes » se lisaient çà et là. Un vaste amphithéâtre soutenu par une colonnade d’où l'on descendait par une double rampe circulaire était adossé au pavillon central du palais.

Pendant que chacun prenait position et que les préparatifs s'achevaient, Robespierre était à déjeuner dans un appartement intérieur des Tuileries, chez le juré du tribunal révolutionnaire Villate. Il contemplait par la fenètre le magnifique spectacle qui s'étendait sous ses yeux. Tout à son émotion, il exhalait parfois en de brèves exclamations sa sensibilité bien connue : « Voilà