Les fêtes et les chants de la révolution française

L'ART RÉPUBLICAIN EN L'AN I. 175

ils prirent le parti de ne rien faire sans avoir reçu d'avance une approbation en bonne et due forme. Donc, le 28 messidor, par une lettre signée collectivement de l'administration et du jury de l’Institut national, ils soumirent au Comité le projet de programme suivant :

Ouverture de Démophon. — Hymne à l'Étre suprême, à grand chœur et grand orchestre. — Ouverture d'Iphigénie. — La Bataille de Fleurus, par Lebrun. — Le Chant du Départ, hymne de guerre. __ Chœur d'Ernelinde (O0 Mars!). — Dernier morceau de la symphonie en ul d'Haydn. — La Marche de Châleauvieux, à grand chœur. — La Marseillaise, Ça ira, la Carmagnole et le Pas de charge.

Ces propositions n’agréèrent pas entièrement au Comité. L'ouverture d’Iphigénie rappelait sans doute le souvenir de la superstition et des tyrans : elle fut biffée d'une main autoritaire. Les collègues de Robespierre oubliérent-ils donc que Jean-Jacques Rousseau, leur maître, avait écrit : « Pourquoi répéter sans cesse que l'homme ne peut atteindre à la perfection? Je connais, quant à moi, trois choses parfaites : le IV® chant de l'Énéide, la colonnade du Louvre et l'ouverture d’Iphigénie. » Du moins n'était-ce pas à Gluck que l’auteur de cette suppression voulait s’en prendre, car il inscrivit à la place d'Iphigénie le chœur d’Armide : « Poursuivons jusqu'au trépas l'ennemi qui nous offense. » Enfin, audessous de la symphonie d'Haydn, la même main a ajouté : « Prise de la Bastille, par Désaugiers ». Et le projet ainsi modifié fut renvoyé à Sarrette. Toute l’économie du programme, savamment combiné, s’en trouvait dérangée : il fallut faire des interversions, ajouter quelques numéros inoffensifs ; mais, comme on n'’osait plus maintenant prendre la moindre responsabilité sans ètre sûr d'être approuvé en haut lieu, le Comité de l’Institut de musique proposa une dernière rédaction, par une lettre écrite le 23 messidor, signée F. Duvernoy,