Les fêtes et les chants de la révolution française

L'ART RÉPUBLICAIN EN L'AN I. 177

premiers moments d'énergie, d'inquiétude et d’agitation qui “ent le signal de l'insurrection et de la liberté. ur 8

Plus tard, Castil-Blaze, dont les hâbleries méridionales sont toujours savoureuses, à raconté à sa manière cette exécution colossale de l'hymne de Rouget de Lisle :

Le dernier couplet : Amour sacré de la patrie! fut dit lentement, avec expression, par les femmes seules, tous les auditeurs à genoux et découverts. Au repos qui précède le chœur : Aux armes citoyens! l'immense fenêtre du grand pavillon s'ouvre, et trois cloches énormes, que l’on y avait suspendues, sonnent le tocsin, cent tambours roulent avec fracas, tandis que cent autres battent la charge, sonnée en même temps par un régiment de trompettes posté sur la terrasse du bord de l’eau; douze pièces de canon, soutenues par une brigade entière d'infanterie, font un feu de file, un feu d'enfer, un tonnerre continu, qui se mêle au chœur : Aux armes citoyens !…

Mais la Marseillaise ne fait pas tout un programme : pour la première fois dans les fêtes de la Révolution, on vit, en ce 14 juillet musical, la musique admise pour elle-même. Une symphonie d’Haydn, des ouvertures et des chœurs de Gluck, Vogel, Philidor, toutes œuvres antérieures à la Révolution, n'étaient que de la musique pure : le Concert du peuple, en les accueillant, ouvrait donc toutes larges ses portes à l’art pour l’art.

Il n'eût pas été juste cependant que la musique nationale, art si jeune et déjà si vivace, y perdit ses droits. Il n’en fut rien en effet. Trois œuvres, en dehors des chansons, la représentèrent dignement dans le concert, et la diversité des noms qui les signèrent prouva que l'exemple donné depuis cinq ans par Gossec était dignement suivi. À partir de ce jour, en effet, nous ne le verrons plus seul à fournir le répertoire des fêtes nationales, et les jeunes maîtres qu'il avait appelés à l'entourer à l'Institut national viendront ajouter à son effort leur efficace coopération.