Les fêtes et les chants de la révolution française

246 FÊTES ET CHANTS DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE.

Ce faisant, ils manquèrent d'à propos : la suite des événements nele leur prouva que trop! Quand le concert fut achevé, Bonaparte, s'adressant à Cherubini, d’un air peu satisfait et sans dire un mot de son œuvre, lui fit savoir que le plus grand compositeur, c'était Paisiello, puis, après lui, Zingarelli. Et ce fut tout. Méhul, Lesueur, Gossec, Grétry étaient là, écoutant avec déférence. Il paraît que Cherubini ne put se retenir de murmurer : « Passe encore pour Paisiello, mais Zingarelli… ». Aussi fut-il en disgrâce pendant tout le temps que dura le pouvoir de Napoléon. Est-il besoin d'ajouter que si les causes de celte disgrâce se rattachent plus où moins directement à l'Hymne du général Hoche, cela ne veut point dire que Bonaparte ait regardé Cherubini d’un œil courroucé parce qu'il s'était permis de célébrer un autre grand homme que lui : la commande que lui-même avait faite à un autre musicien en est la preuve certaine; il ne craignait plus ses émules lorsqu'ils étaient morts. Non : ce n'est que pour des raisons de simple dilettantisme que Bonaparte sacrifia Cherubini.

Voyons donc ce qu'était cette Musica funebre de Paisiello objet de ses préférences.

La première impression que j'eus quand j'ouvris à la bibliothèque du Conservatoire, où il est jalousement mis en réserve, le cahier revêtu de la glorieuse signature, fut, je dois l’avouer, un étonnement mèélé de quelque inquiétude. Je me demandai si Paisiello n’a pas voulu se moquer légèrement de son auguste protecteur, ou bien s'il s’est trompé lui-même, croyant écrire un morceau d'opera buffa. La moderne Marche funèbre d’une marionnette donne une idée assez exacte de sa conception : dans l’ingénieuse fantaisie de Gounod, la musique décrit tour à tour les épisodes les plus divers, jusques aux stations du cortège au cabaret: et de même le morceau