Les fêtes et les chants de la révolution française

XXXVI PRÉFACE.

La situation de ce temps-là n’était pas sans analogie avec la nôtre. La Révolution avait annoncé l'avènement d’une ère nouvelle : pour en réaliser les promesses, elle doit détruire, mais, au même moment, réédifier. Done, elle change tout; elle change jusqu'à l’ordre du temps, en établissant un nouveau calendrier. Elle voudrait changer les mœurs. Comme les apparences extérieures ont une action prédominante sur elles, elle tente de changer le costume : David fut plusieurs fois chargé de faire des études pour cette réforme. Elle a assez conscience de l’influence des arts pour exiger que les artistes travaillent dans l’esprit qu’elle propage. Elle crée le « Théâtre du Peuple » et fait appel aux poètes « pour célébrer les principaux événements de la Révolution et composer des pièces dramatiques républicaines ». Ayant tenté, non de SUpprimer, mais de renouveler la religion (car, si elle proscrit les prêtres, elle veut qu’on célèbre le culte de l'Être suprême, ou de la Raison, de la Liberté ou de la Patrie), elle veille à ce que les cérémonies ne disparaissent point : si lon ne chante plus la messe le dimanche, le décadi et les jours de grands anniversaires seront consacrés à des fêtes civiques capables, aussi bien que celles du catholicisme, de frapper l'imagination et de gagner les cœurs. Pour ces fêtes, il faut de la musique, une musique nouvelle : les compositeurs ne manquent pas, elle fait appel à leur concours. Autrefois, l’on avait les maîtrises : qu’à cela ne tienne? On organisera le Conservatoire, qui est la maîtrise de la République; et cette école improvisée, réunissant en un groupement compact tout ce que Paris comprenait alors de forces musicales, envoie des musiques militaires aux frontières et organise les plus vastes exécutions dont l'histoire ait jamais fait mention. A l’église, autrefois, les fidèles unissaient leurs voix pour chanter : Credo: au Champ de Mars, tout le peuple réuni chantera, sous la direction de Gossec, après avoir répété, un hymne nouveau et des strophes sur le chant national : au refrain, cinq cent mille exécutants!

L'intérêt rétrospectif de cette histoire sera doublé si nous la rattachons aux préoccupations de la vie moderne. Certes,

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