Les hommes de la Révolution
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X
Les idées de Marat. — Ses faiblesses.
Conclusion.
Nous nous sommes efforcé de dégager Marat de la légende. Nous avons essayé d'indiquer, à grands traïts, en faisant parler le plus possible l'intéressé, la figure peu banale de celui qui symbolisa le peuple, ses souffrances, ses aspirations et ses colères.
Disons quelques mots de ses idées politiques, philosophiques et sociales.
Le plus consciencieux et le plus érudit des historiens de la Révolution — nous avons nommé M. Aulard — a voulu voir dans l’Ami du Peuple un précurseur des pessimistes modernes. Il a noté ce désespoir philosophique que devaient interpréter, trente ans plus tard, Léopardi et Schopenhauer. Selon nous, Aulard s'est trompé. Sans doute, à plusieurs reprises, lorsque les événements ne vont pas à son gré, Marat exprime un violent désespoir, un dégoût des hommes et des affaires publiques. Mais cela ne durait pas. L'Ami du Peuple savait se ressaisir facilement.
Ce qui le distingue surtout, c'est son amour excessif pour les hommes, amour sans illusion, certes, mais absolument incompatible avec le pessimisme qu'Aulard prête à l’Ami du Peuple.
Quand on aime l'humanité au point d'accepter que l'existence devienne un véritable calvaire, quand on sait subir privations et souffrances pour