Les Révolution

LA DÉFAITE DES CAUSES JUSTES. 163

Quoi de plus noble et de plus touchant à la fois que le rôle des Gracques? Le sang le plus fier de Rome coulait dans leurs veines: mais les jeunes patriciens semblaient échapper à la dureté traditionnelle de leur race. Le commerce des lettres les avait adoucis et ils n’étaient pas étrangers à la philosophie grecque, dont le souffle généreux commençait à pénétrer dans Rome. Ils furent touchés de la misère du peuple, qui avait tant fait pour la grandeur de la République. L’un d'eux avait remarqué avec effroi que l'Italie devenait déserie et qu'on ne rencontrait plus que des esclaves dans ses campagnes dépeuplées. Ce spectacle lui avait arraché des larmes. Il s’agissait de repeupler ces'solitudes en donnant les terres aux citoyens pauvres, dont la misère était une honte et un péril ; c’est ce qu’ils voulurent. Le plus âgé commença la lutte, mais il fut égorgé bientôt-par les patriciens; le plus jeune suivit, en s’arrachant à toutes les joies et à toutes les tendresses, et il ne tarda pas à subir le même sort. Ils avaient succombé dans leur entreprise : on les insulta. Les lettres elles-mêmes, pour les attaquer, se firent les complices des rancunes patriciennes. Juvénal