Lettres inédites de Frédéric Gentz à sir Francis d'Ivernois (1798-1803)
encore intact, et lues à haute voix deux fois par jour dans chaque conseil supérieur. Ceux qui sont dignes de vous entendre, pourront du moins dire un jour de vous :
Si Pergama dextra De fendi poterint, eliam Lac defensa fuissent.
Le résultat de votre ouvrage est en général un résultat bien iriste. Loin que la pénurie absolue du Gouvernement français, dont vous avez porté la démonstration à une évidence mathématique (et que le dernier rapport de Villers ! du 12 février vient de confirmer de nouveau d’une manière irrésistible), loin que cette pénurie puisse me rassurer, elle m’effraye pour la tranquillité de l’Europe entière. Un gouvernement qui a des soldats et qui manque d’argent — n’est-il pas par cela même l'ennemi né de chaque partie du monde, où il peut espérer de trouver quelques écus? Quelle perspective ! Et comme Îles événements de chaque jour légitiment les craintes de ceux qui savent apprécier la véritable situation des affaires politiques ! Sans doute, un gouvernement bâti sur une base aussi monstrueuse ne durera pas ; sa destruction est inévitable ; mais peut-on calculer limmensité des maux dont il comblera l'humanité avant que cette destruction s’accomplisse ?
Après avoir fait l’essai de continuer votre histoire de lAdministration des Finances en 1796 jusqu’au mois d’avril 1797, c'était bien mon intention de la conduire plus loin, et de suivre sans relâche cette administration mémorable dans tous
ses détails. J'avais rassemblé d’assez bons matériaux pour m Ne de cette entreprise. Maintenant que votre ouvrage a paru, j'y renoncerai, et d’ autant plus volontiers que j'aurais été obligé de publier fort tard ce que j'aurais pu composer de ces matériaux. Étant nommé par le Roi actuel® à plusieurs commissions extraordinaires très importantes pour l’administration de nos affaires intérieures, je dois m’abstenir, du moins
.F rançois-Toussaint Villers, 1749-1806, membre puis président du Conseil des
Duc, : 2. Frédéric-Guillaume IN, monté sur le trône de Prusse le 16 novembre 1797.