Lettres sur la révolution française : par J. Gorani, citoyen français, à son ami Ch. Pougens

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patience étoit épuifée , parce qu’ils ne pouvoient plus fupporter les déréglemens excellifs d’une reine ,qui ne refpiroit que la ruine de l’Etar.

D'ailleurs les Français haïfloient des His qui difpofoient arbitrairement de leur liberté , de leur fortune , de leur vie, & qui faifoient périr dans des fupplices horribles, prefqu’autant d'innocens que de coupables. Ecrafés d'impôts, de douanes & de dimes, les Français déteftoient leurs traitans, leur armée nombreufe, & les intendans qui exercoïent dans les provinces le defpotifme le plus oppreffif & le plus ruineux.

Les Français étoient indignés contre une nobleffe infolente, ignare, avide, qui s’attribuoit exclufivement les premiers emplois eccléliaftiques , civils & militaires, &c' toutes les faveurs de la cour; une nobleffe qui les tourmentoit & les ruinoit par une multitude de droits féodaux exceflivement onéreux , par des corvées & des fervitudes odieufes, par des chafles qui dévaftoient les campagnes, par des juftices feigneuriales & tyranniques, par le libertinage le plus effréné, &c. &cc.

Les Français, fire, en proie à l’infatiable cupidité des princes, des miniftres @ des courtifans, fe font effrayés de l’énormité de la detre que cette cour vorace avoit contraûtée , & qu'elle augmentoiït fans cefle; ils ont été vivement frappés de la menace d’une banqueroute affreufe, dans laquelle ils f voyoient précipirés par les continuelles dilapidations des courtifans.

Enfin, le clergé de France, perdu de dettes & de vices, ne ménageoit même plus les apparences; il s’abandonnoîït au fcandale , & les Français n’avoient de ref. fource que dans la faifñe & la vente de fes biens, pour