Livre d'or des officiers français de 1789 à 1815 : d'après leurs mémoires et souvenirs

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« La plupart des officiers d'ordonnance et des aides de camp du prince de Wagram sont les Geais de l’armée, obtenant les faveurs que l’on doit à d’autres, gagnant des cordons et des majorats pour avoir porté quelques lettres dans les camps, sans avoir vu l'ennemi, insultant par leur luxe à la modeste fortune des plus braves officiers, pensant beaucoup à leur toilette, et plus fats au milieu des batailles que dans le boudoir de leurs maîtresses. J'en ai vu dont la gjiberne en vérmeil était un petit nécessaire complet, et contenait, au lieu de cartouches, des flacons d’odeur, des brosses, un miroir, un gratte langue, un peigne d’écaille ; il n'y manquait que le pot à rouge. Ces brillants officiers sont en général insolents, ignorants et libertins. » (1).

Cadet DE GassicourT. Voyage en Autriche, p. 266.

Les officiers n'étaient jamais satisfaits. Et cependant, les dotations dont les combla Napoléon Ir, étaient loin d'être sans importance.

«Pourles trente-et-un duchés et principautés que Napoléon érigea, les dotations varient de 1.254.945 francs de rente (Berthier, prince de Neufchâtel et de Wagram, ayant de plus les revenus de Neufchîtel, dont il était le souverain) à 80.000 francs de rente. (Decrès, Junot, Macdonald). Un seul, Kellermann, n’a que 55.000 francs de rente.

« La malhonnèteté était générale, et, comme une cuisinière fait danser l’anse du panier, l’entourage de Napoléon I« s’enrichissait par les procédés les plus hardis.

« Après Waterloo,et avant le départ pour Rochefort. deux vols inexplicables eurent lieu à l'Elysée. Une caisse de tabatières à portraits enrichis de diamants, et qu’on venait d’apporter de la part du grand chambellan, fut déposée par le général Bertrand, sur la cheminée de son salon. Pendant quelques instants qu’il s’approcha d’une fenêtre avec le messager de M. de Montesquieu, une seule personne était

(x) Déjà, en 1750, les officiers se fardent de blanc, de rouge, mettent des mouches et se rendent tellement esclaves de leurs figures qu’ils craignent de gâter leur beau teint au soleil et n’osent même tourner la tête, crainte de déranger leur coiffure*, On ne s’étonnera plus de ce que les Prussiens aient trouvé tant d’eau de Cologne dans le camp de M. de Soubise. — Dussieux. L'armée en France, t. Il, p. 302.

* Prosper de Siouviile, capitaine d’infanterie. Œuvres, 1756, t, I, p. 27.