Marat inconnu : l' homme privé, le médecin, le savant : d'après des documents nouveaux et inédits

192 MARAT INCONNU

À dire vrai, son entrée dans la vie publique marque une ligne de démarcation dans son existence. Il a conscience du rôle écrasant qui lui incombe, et désormais sacrifie sa fortune et son repos au triomphe des idées qu'il défend.

Il n’est rien autre que l'ami du peuple et, à cet effet, il est entré, de plein pied, dans la peau de son personnage. Il donne tous les jours audience aux malheureux qui encombrent son antichambre, laquelle devient, par instants, une sorte de Cour des miracles.

Ce sont là les sujets dont il est le roi sans conteste. A-t-il besoin pour les recevoir d’étaler un luxe insultant ?

Chez lui, il se contentera de bottes sans bas, d'une vieille culotte de peau, d’une veste de taffetas blanc (1).

C'est évidemment à une époque antérieure à la Révolution que doit se rapporter la description qu'a laissée de son appartement un de ses ennemis politiques ; description reproduite depuis avec tant de haineux commentaires par les détracteurs du tribun.

N'y avait-il pas un intérêt de premier ordre à montrer le prétendu démocrate se dépensant en galanteries « dans un salon très frais, meublé en damas bleu et blanc, décoré de rideaux de soie

(1) Mémoires de Mne Roland, t. II, p. 191.