Marat inconnu : l' homme privé, le médecin, le savant : d'après des documents nouveaux et inédits
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nous ne pouvons qu'admirer cette aisance. Combien trouvons-nous plus avisé M. Taine, quand il se contente de rester psychologue ! Combien plus exact ce jugement auquel, pour notre part, nous n'hésitons pas à souscrire, sauf de très légères réserves : « Pendant trente ans, Marat a roulé en Europe ou végété à Paris, en nomade et en subalterne, écrivain sifflé, savant contesté, philosophe ignoré, publiciste de troisième ordre, aspirant à toutes les célébrités et à toutes les grandeurs, candidat perpétuel, et perpétuellement repoussé. Il n'était fait que pour enseigner une science ou exercer un art, pour être un professeur ou un médecin plus ou moins hasardeux ou heureux; pour suivre, avee des écarts, une voie tracée d'avance... »
Il a la manie des persécutions, dit encore M. Taine, et il l'en excuse en trop bons termes pour que nous ne citions pas le passage : « Naturellement le soi-disantpersécuté se défend, c’est à-dire qu'il attaque. Naturellement, comme ilest l’agresseur, on le repousse, et après s'être forgé des ennemis imaginaires, il se fait des ennemis réels, surtout en politique, où, par principe, il prèche tous les jours l'émeute etle meurtre. Naturellement enfin, il est poursuivi, décrété par le Châtelet, traqué par la police, obligé d’errer et de fuir de retraite en retraite, de vivre des mois entiers à la façon d’une chauve-souris dans