Notes de police : de Robespierre à Fouché : documents inédits : papiers secrets, erreurs judiciaires, complots, pamphlets, choses d'Église

UN PROCÈS EN RÉVISION MILITAIRE 13

dix-huit témoins, dont treize militaires, révèle un état d'entente parfaite entre ces derniers; mais la leçon trop bien récitée laissait percer parfois d’étranges contradictions. Il y avait lutte évidente entre l'élément aristocratique militaire, que représentait l’accusateur, et l'élément « nouveau», qu'incarnait Berceau, fils du peuple. Ce qu’on reprochait à Berceau, plus encore que sa prétendue désobéissance, c'était la sympathie populaire dont il avait su s'entourer; comme on voulait le perdre, et comme il avait dit, suivant un témoin, qu'il irait réclamer à l’Assemblée nationale contre l'injustice commise à son égard, des cuirassiers de bonne volonté traduisirent cette menace en cette autre : Berceau, affirmaient-ils, avait déclaré vouloir « aller en empire », c'est-à-dire déserter.

Tous les moyens furent bons pour accabler l’ancien sous-officier. On fit des démarches au directoire du département afin d'obtenir la suppression de certains témoignages; on en paya d’autres; on choisit, parmi les soldats de son détachement, une forte tête, un nommé Legal, qu'on menaça, qu'on enferma, qu’on fit boire, espérant trouver en lui le témoin décisif; on n’y parvint pas; et, plutôt que de l'entendre lui-