Portalis : sa vie, et ses oeuvres

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juste que possible. Ce système est celui qu’adoptèrent les rédacteurs du Code Civil, et que Portalis eut à défendre devant le Conseil d'État.

Il écarta d’abord du débat toute doctrine politique et plaça la discussion sur le terrain du pur droit civil ; il rappela, pour les condamner, les premières lois suc cessorales de Rome conçues dans un esprit de domination absolue, comme les lois de l’ancienne monarchie empreintes de l'esprit féodal, et il fit entendre ces sages paroles :

« À moins qu’une nation ne trouve, dans sa situation » particulière, de puissants motifs pour suivre la raison » politique, elle fera sagement de se diriger par la » raison civile, qui ne choque personne, qui prévient les » rivalités et les haïnes dans les familles, qui propage » l'esprit de fraternité et de justice, et qui maintient » plus solidement l'harmonie générale de la société *.»

D’après ce principe, c’est de l'équité naturelle et de la constitution morale de l’homme que Portalis déduit la faculté de tester. Il ne peut admettre qu'on enlève au mourant la suprême consolation de répandre ses bienfaits sur les survivants; il déclare immorale une loi, qui ne se bornerait pas à prévenir les erreurs de certains pères de famille, mais qui leur lierait absolument les mains et les mettrait tous en suspicion ; il affirme, comme une conséquence du rétablissement du pouvoir paternel, la nécessité de lui donner une sanction, et il prouve que, dans beaucoup de cas, le partage

4. Portalis, Discours, rapports et travaux inédits sur le Code Civil, Discours préliminaire, page 59. ‘