Portalis : sa vie, et ses oeuvres

Lg 5 19

PORTALIS

« Dès lors, lorsqu'un citoyen s’est trouvé dans des » circonstances telles que, s’il eût connu toute l'étendue » de la lésion, il n’eût pas souscrit le contrat, on ne » peut pas dire qu’il ait consenti, car personne ne » consent spontanément à d’aussi grandes pertes ; aussi » Dumoulin dit-il qu’il doit être restitué non comme » lésé, mais comme trompé.

» Et qu'on ne dise pas qu’on ne peut pas supposer » que des majeurs se laissent surprendre.

» Un majeur qui sort de minorité, surtout depuis » qu'elle finit à vingt-un ans, n’a pas encore atteint » l’époque de sa raison.

» Un majeur n’est pas toujours présent, il est obligé » de donner des procurations, même générales; son » mandataire est trompé, quelquefois il le trompe.

» Un majeur vieillit, et l’on profite de sa caducité » pour lui surprendre, sous le titre de vente, des dona» tions que la vileté du prix simulé fait reconnaître.

» Un majeur enfin n’est pas infaillible; quand il est » » trompé, il a in à la protection des lois comme tout » autre opprimé !, »

Ces arguments ont une valeur incontestable ; mais les adversaires du projet, Berlier notamment, leur opposaient des considérations qui semblent décisives. Berlier ne niait pas qu'il y eût un intérêt moral à déclarer non avenue une vente à vil prix; mais il pensait que la mission de la morale pure doit demeurer distincte et séparée de celle de la loi. Au point de vue de

1. Portalis, Discours, rapports et travaux inédits sur le Code Civil, page L1L, Séance du 24 nivôse an XI,