Portalis : sa vie, et ses oeuvres

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qu'on l’a fait lors de la conclusion du Concordat, qu’il ne restait plus, de la religion de nos pères, que des ruines et de sanglants souvenirs. Dans certaines provinces, l’exercice du culte n’avait jamais été interrompu, même au plus fort de la Terreur; dans d’autres, il s’était maintenu sous la protection des populations insurgées, et, depuis la chute de Robespierre, beaucoup d’églises s’étaient rouvertes ; mais, pour ‘n’être pas désespéré, l’état religieux de la France n’en était pas moins critique. Fomentée pendant un siècle entier par des publicistes de génie, excitée et en quelque sorte justifiée par la conduite du clergé de cour, la haine contre les prêtres avait éclaté avec fureur sous la Convention : l’interdit avait frappé la France, le schisme s'était déclaré, le sang avait coulé ; le clergé proscrit avait perdu sa puissante organisation, il ne pouvait ni combler les vides que la Révolution avait faits dans ses rangs, ni relever les ruines de ses sanctuaires ; ses membres, divisés en constitutionnels et en réfractaires, se lançaient réciproquement l’anathème ; enfin, les âmes, n'étant plus excitées par la lutte, grandies par le danger, s’abandonnaient au découragement et au scepticisme. Seuls, quelques esprits élevés sentaient la gravité de cette maladie morale et cherchaient à réveiller la vigilance du Gouvernement ; mais leurs voix généreuses se perdaient au milieu de Pindifférence publique ou n’excitaient que le rire moqueur des incrédules.

Ce fut dans cette situalion, si dangereuse pour l'Église, que le Premier Consul fit au Saint-Siége la pro-