Portalis : sa vie, et ses oeuvres

LE CONCORDAT 249 voyait ou feignait de voir dans la restauration religieuse le prélude d’une restauration politique. Au dire de ces réformateurs violents et aveugles, dont la race subsiste encore, l’affranchissement de la nation était imparfait tant que le dernier prêtre n’avait pas franchi la frontière, tant que le dernier vestige de la foi catholique n’était pas effacé. Aussi, au seul bruit d’une négociation avec la cour de Rome, que d’invectives et de railleries de leur part! Ils tournaient en dérision ce qu’ils appelaient, en style de l’époque, la capucinade du Premier Consul ; ils disaient que Bonaparte, dominé par les influences féminines et devenu l'instrument docile des prêtres, était sur le point de mettre, en sa personne, la France entière aux pieds de la Papauté. Ils répandaient le bruit que, depuis son retour d'Égypte, un mal étrange le consumait, que son caractère était abattu, son esprit affaibli; ils affirmaient qu’il allait répudier le glorieux souvenir des victoires remportées pour le salut de la République, que la France devait bientôt être couverte de monastères et de biens d'Église, que la dime serait rétablie, et que, pour compléter le triomphe de l’ancien régime, on verrait, dans un avenir prochain, les princes exilés rentrer en France avec les émigrés et les chouans et reprendre la couronne que le vainqueur de Marengo, à l’exemple de Monk, leur remettrait docilement, en échange de l’épée de connétable. À ces insinuations absurdes, que la malveillance publique accueillait et propageait, les terroristes incorrigibles mêlaient des menaces : ils disaient qu’ils ne toléreraient pas cette