Portalis : sa vie, et ses oeuvres

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des prêtres constitutionnels, et le légat aïmaït à se persuader que le projet de choisir des évêques parmi eux était définitivement abandonné.

Il n’en était rien cependant. Loin de perdre de vue la prochaine réorganisation du clergé, Bonaparte avait chargé Portalis de dresser la liste du nouvel épiscopat. Portalis présenta une liste composée exclusivement, sauf deux noms, de membres de l’ancien clergé!. Elle fut repoussée : le Premier Consul exigea impérieusement que plusieurs des nouveaux prélats fussent choisis parmi les prêtres constitutionnels.

Il ne restait à Portalis d’autre alternative que de céder ou de se retirer : il céda. Il ne manquera sans doute pas de rigoristes parlementaires pour lui reprocher une condescendance qu’il est aisé de qualifier de faiblesse, sinon de complaisance; mais il faut, avant tout, être juste et considérer froidement la situation et les faits. Portalis savait que Bonaparte ne reviendrait pas sur une résolution arrêtée, et il ne doutait pas que, s’il tombait pour avoir combattu le clergé constitutionnel, on ne lui donnât un successeur ouvertement hostile aux prêtres réfractaires, à supposer même que l’on s’occupät encore de nominations épiscopales. Le Concordat était, en effet, de date trop récente, l’entourage du Premier Consul, les grands corps de l'État, l’armée voyaient avec trop de répugnance la restau ration des autels, pour qu’il fût prudent de risquer, sur une question relativement secondaire, le maintien de la

A. Jauffret. Mémoires sur les affaires ecclésiastiques de France au commencement du xixe siècle, tome Ier, page 39.