Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

NATIONALE. 53

au passage du Moerdick. La petite ville de Willemstat humilia Ja première ses armes. Déjà l'avant-garde d’un corps de quinze mille Anglais commandés par le duc d'Yorck avait débarqué en Hollande avec une promptitude qui annonçait combien l'Angleterre était préparée aux mouvemens hostiles. Leur présence faisait déjà taire en Hollande le parti qui favorisait les Français. Un détachement de ce corps entra dans Willemstat ; et changea la fortune ; mais elle préparait bien d’autres épreuves à Dumouriez.

Il avait chargé le général Miranda du siége de Maëstricht: la possession de cette place pouvait seule garantir aux Français la conquête des Pays-Bas ; elle leur opposait une résistance opiniâtre. Un corps d’émigrés français était enfermé dans ses murs, et la défendait avec tout le courage que donne le désespoir. L'armée qui protégeait le siége s’étendait jusqu’à Aix-la-Chapelle ; ses cantonnemens couvraient une ligne beaucoup trop étendue. Le prince de Cobourg mé ditait une surprise et feignait l'inaction. Le premier mars il ouvre la campagne, il enlève les avant-postes, favorisé peutêtre par quelques intelligences avec des officiers français , mais sur-tout par l’état d’indiscipline où vivait depuis quelque temps cette armée. Nulle part on ne se rallie ; il n’y a plus de vainqueurs de Jemmappes. La déroute fut telle, qu’une multitude de fuyards arriva jusqu’à Paris. Au reste, ils n’avaient point à craindre d’y venir produire leur honte : ils étaient accueillis mieux que des vainqueurs ; ils venaient dénoncer. Miranda se vit contraint de lever le siége de Maëstricht , le prince de Cobourg passa la Meuse.

Dès que ces malheurs furent connus, la convention ne vit plus d’espoir de salut que dans Dumouriez. Il reçut l'ordre d'abandonner son entreprise sur la Hollande; de réunir toutes ses forces pour les opposer au prince de Cobourg. Quoique Dumouriez eût ouvert cette campagne avec de fâcheux pressentimens , l'enthousiasme dont il était rempli pour le plan qu’il venait de concevoir, etstrois places fortes emportées , lui avaient rendu tout l'essor de son esprit confiant. Loin de la convention, son imagination s’exerçait sur les moyens de la dominer ou de la réduire au silence, Il venait même de faire un éclat hâtif, inconsidéré. Il ménageait les jacobins dans deux de leurs chefs, Danton et Lacroix, qui presque toujours marchaieët à sa suite , avides des dépouilles qu’il laissait tomber sur: son passage. D'un autre côté, il entretenait une correspondance assidune avec les girondins par le moyen de Gensonné. Celui-ci l’entretenait des dangers pressans auxquels son parti était exposé. Dumouriez, qui n'avait point d'affection pour eux, voulut

: