Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

46 CONVENTION

à Louis que le peuple francais, toujours Magnanime, prendrait soin de sa famille ? Dieux, quelle promesse ! comme ils l'ont tenue! Que d'horreurs il me reste à décrire !

Louis avait obtenu de dire le dernier adieu à sa famille. Il lui semble que c’est ici que commencent ses épreuves : sa famille, elle ignore tout. Il entra, il se vit au milieu d'elle... Après quelques momens de silence, les sanglots éclatèrent. Derrière un vitrage, des surveillans les observaient; ils virent les bénédictions données par le plus malheureux des pères à ses malheureux enfans ; ils virent ses embrassemens et les convulsions de la douleur. Louis s’arracha des bras de sa femme , de sa sœur, de ses enfans. Son ame était déchirée. Il reçut alors la plus précieuse consolation qu’il avait demandée. Garat lui amenait le confesseur qu'il avait désigné, M. Edgeworth ou Frémont, prêtre irlandais.

La nuit qui précéda son supplice, Louis eut un sommeil profond et paisible. M. Frémont et le fidèle Cléry avaient veillé près de lui. Le jour n’avait pas encore paru ; le bruit des tambours , des canons répandait déjà de tous côtés la terreur dans Paris. Louis, calme et recueilli dans le seul sentiment qui fait taire les douleurs mortelles ,; assistait à une cérémonie religieuse qu’on avait permis pour cette fois de pratiquer dans la prison; il se préparait , par le sacrifice vénéré des chrétiens, au sacrifice dont il allait être la victime. Resté seul avec Cléry, il lui parla de lui, des précautions qu’il avait à prendre pour que son zèle ne lui fût pas funeste, et puis il lui remit les derniers gages de tendresse qu'il avait à léguer. — Vous remettrez ce cachet à mon fils, cet anneau à la reine ; dites-lui que je le quitte avec peine. — Faites-leur mes adieux : j'avais promis de les revoir, j'ai voulu leur éviter une séparation si cruelle. — Santerre entre. — Vous venez me chercher ; je vous demande une minute. Il pria un exécrable prêtre, nommé Jacques Roux, commissaire de la commune , de remettre une lettre à la reine; il se reprit, à ma femme. Cela ne me regarde pas, répondit ce barbare; je ne suis ici que. pour vous conduire à léchafaud. Un autre accepta, ou parut accepter cette commission. — Il se tourna vers Santerre. — Partons.

Louis, arrivé au pied de l’échafaud, recut de son confesseur ces paroles inspirées : Fils de saint Louis, montez au ciel! — Il se tourna vers le peuple; d’une voix ferme et sensible il commenca ces mots : Francais , je meurs innocent; je pardonne à mes ennemis ; je désire que ma mort...

Santerre commanda un roulement tle tambours pour étouf-

er sa voix,