Rouget de Lisle : sa vie, ses œuvres, la Marseillaise

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cette somme, il n’en avait pas même reçu la moitié; ül fondait son espoir sur une promesse formelle d’un prêt de 2,000 francs. Le prometteur lui fit faux-bond et le voilà de rechef dans des inquiétudes mortelles. Pour toutes ressources, il comptait hypothéquer (hypothéquer, grand Dieu !) son opéra de Macbeth, recu au théâtre de l'Opéra et dont on avait annoncé la représentation pour un temps relativement prochain. Nous sommes au 15 mars 1825.

Malgré sa situation précaire, Rouget avait quelques belles relations artistiques, scientifiques ou littéraires. Mais ce n’est pas là qu’il pouvait trouver ce qui lui manquait. Charles Nodier, son compatriote, casé à la bibliothèque de l’Arsenal, avait été plus que froid avec lui et peu obligeant; Chappe, l'inventeur du télégraphe, retiré et pensionné de 10,000 francs, avait sa famille qui absorbait son revenu; le comte Orloff, qui venait de publier un volume de fables russes pour lesquelles Rouget avait fait une préface, ne se doutait pas de la misère de son collaborateur et puis il venait de partir brusquement. Et puis Rouget ne savait pas demander. Son amourpropre lui faisait mal voir et mal juger des gens. Et puis les gens d’argent, les fourmis égoïstes, ne sont pas prêteuses aux cigales qui n’ont pas pu amasser de grain pour l'hiver, et puis l’organisation sociale, trop jeune encore, pour faire la part des auteurs des œuvres d’art; tout, en un mot, concourait à laisser Rouget dans le plus profond dénüment, avee une œuvre de valeur en main, avec deux œuvres,ses Chants francais et son Macbeth ! Pendant l’année 1825, Rouget de Lisle travaille à un journal quise publie sous le nom de Revue britannique, en vivant trés maigrement du produit de la vente de quelques exemplaires de son recueil les Chants français. Son opéra Macbeth est reçu. On en commence

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