Rouget de Lisle : sa vie, ses œuvres, la Marseillaise

moe

nière de mes sœurs, morte avant le temps, et peinte dans la première fleur de la jeunesse. Placée dans l'ombre, cette figure charmante en recevait une teinte de mélancolie qui paraissait exprimer le regret de ne point partager une retraite qu’elle eût embellie par tous les charmes de l'esprit et de l’amitié.

«Mes regards ne pruvaient se détacher de ces portraits; en vain m'en éloignais-je : un ascendant invincible m'y ramenait sans cesse. Le cœur gros de sanglots et de larmes, suffoqué par l’attendrissement, je me jetai dans un fauteuil; ce fauteuil, la place qu'il occupait, étaient ceux que ma mère avait préférés. Je pleurai beaucoup en les reconnaissant. Cette crise dissipa mon oppression, et je tombai dans un exlase que prolongèrent le parfum des fleurs et l’espèce de magie dont j'éprouvais l'empire. Je ne revins à moi qu'au son de minuit qui, retentissant dansle lointain, à l'horloge de la ville, m’avertit que, pour un solitaire, il était heure indue, et je me couchai machinalement. «Etrange effet du hasard! dans le conflit de ces mille idées qui venaient de m'assaillir, pourquoi la plusfutile, la plus insignifiante, avait-elle jeté dans mon imagination les racines les plus profondes? À quelque distance de Montaigu, en tirant vers la montagne, il est un bois que j'aitoujours aimé, sans doute parce qu'il avait été le principal théâtre de mes amusements, le premier asile de mes réveries. Depuis mon retour j'avais oublié de le visiter; et, tout en me rappelant cet oubli, je m'étais bien proposé de le réparer. À peine dans mon premier SOmmeil, je m'imaginai qu'au lever de l’aurore je m’acheminais vers ce bois dont je gardais un si doux souvenir. Arrivé sur un vaste plateau qu’il termine, je fus frappé d’étonnement à l'aspect d’un édifice dont j'ignorais absôlument l'existence, et que je voyais s’élever au milieu