Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

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sanctuaire, où se trouve la statue colossale de saint Jacques, énorme masse d'argent. Le saint, qui lançait naguère par ses yeux les feux du diamant, est aveugle aujourd’hui.

Nous continuäâmes notre route sur Toui et arrivâmes à Banos, ville célèbre autrefois par les bains d’eau chaude que les Romains fréquentaient : à notre passage, la ville regorgeait de vin dont nos troupes s’emparèrent. Comme aux noces de Gamache, on en vit couler des ruisseaux dans les rues.

Pendant ce voyage, le maréchal s’occupait avec un tendre intérêt de la duchesse; un de mes camarades s’était déclaré le chevalier de la fille aînée, et je protégeais moi-même la cadette, belle grande fille de dix-sept ans, aux longs yeux noirs, à la taille svelte, dont le teint cuivré laissait voir couler dans ses veines le sang des Maures, et qu’à cause de cela mes camarades appelaient du surnom moqueur et gracieux à la fois de bâton d’ébène.

Nous nous efforçämes, à Banos, d'égayer ces dames et notre état-major. Le soir, après que la chaleur était passée, on commençait les rondes nationales, et elles duraient longtemps dans la nuit.

Ce fut à Banos que je vis une Francaise arriver à cheval et demander le maréchal Ney. C'était celle qui, depuis, s’est nommée /a Contemporaine. Cette femme disparut bientôt; ce qu’elle dit du maréchal dans ses Mémoires est de pure invention.