Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

GUERRE D'ESPAGNE EN 1808 ET 41809 163

et ne doutant pas de sa perte, il me supplia de me charger de son petit trésor, qui consistait en dixneuf quadruples d’Espagne, formant ensemble une somme de 1 600 francs; ces quadruples étaient contenus dans un gant long de femme. Je voulais refuser cette commission; mais Delannoy insista, en disant qu'il était sans doute destiné à périr et que, puisque j'étais parvenu sain et sauf jusqu’à lui, je me tirerais de même d'affaire pour le reste du chemin. J’acceptai et pris congé de lui. J’arrivai enfin à Ségovie, où j’admirai le célébre aqueduc, construit par les Romains, et dont les arches gigantesques donnent la plus haute idée de la puissance de cette nation. De Ségovie à Madrid, la route n'offrait plus de dangers.

Je rendis compte au roi Joseph et au maréchal Jourdan de notre position en Galice: je fis connaître qu'aucun de leurs officiers n’était parvenu auprès du maréchal Ney depuis six mois, et que, depuis le même temps, nous étions privés de nouvelles de la France. Le roi me dit qu'aucun aide de camp envoyé de la Corogne n’était non plus arrivé dans sa capitale. Je fus autorisé par lui à rester quelques jours à Madrid et son major-général Jourdan me prévint qu’il me donnerait des ordres pour mon départ.

La Garde et d’autres troupes françaises remplissaient la ville. Je profitai de l'argent que Delannoy venait de me remettre pour me faire équiper à neuf; six mois après, à ma rentrée en France, j'eus