Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

1814. CAMPAGNE DE FRANCE 491

Schwarzenberg n'avait pas encore fait sa jonction avec le feld-maréchal prussien Blücher, dont les avant-postes étaient déjà à Saint-Dizier, marcha, attaqua et repoussa l'ennemi, qui se dirigea sur Brienne (À).

Napoléon s'établit le 27 janvier à Saint-Dizier; la ville était encombrée de troupes. On me donna un billet pour un logement chez la comtesse Clermont de Mont-Saint-Jean et je me présentai avec mes trois domestiques et mes sept chevaux. Ce nombreux équipage effraya sans doute, car on me reçut avec beaucoup moins d’empressement qu'on ne l’eût fait en Autriche et en Pologne, au point qu’il me parut préférable de me retirer et de m'installer à mes frais dans une auberge. Aïnsi déjà en France même on nous traitait en ennemis! Néanmoins, je crus devoir, dans la journée, faire une visite à la comtesse, qui me reçut dans son boudoir; là, après mille plaintes contre l’aide de camp de l'Empereur F..., qui, moins discret ou plus entreprenant que moi, s'était emparé de tout son appartement, de sa propre chambre même, et ne lui avait laissé que ce petit cabinet, Mme de Mont-Saint-Jean me fit connaître les craintes que lui inspirait l’arrivée de l'Empereur, et, fondant en larmes, elle témoigna une si vive douleur que je sollicitai d'en connaître les causes. Je réussis sans doute à lui inspirer

(4) Blücher avait laissé à Saint-Dizier le détachement russe de Landskoï pour masquer son mouvement sur Brienne, destiné à couper Mortier isolé. (Nole de l'éditeur.) -