Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

198 SOUVENIRS D'OCTAVE LEVAVASSEUR

ments ; que la ville de Paris, d’où je viens, attend l'ennemi et le désire pour en finir; que le prestige, qui, jusqu'alors, suivait l'Empereur, est détruit.

Le maréchal Berthier m'écouta avec attention; il me prit sous le bras et me dit: « Mon ami, venez avec moi voir l'Empereur; dites-lui bien tout ce que vous avez vu, tout ce que vous savez et parlez avec confiance. » Tout en cheminant, le prince de Neuchâtel m’encourageait encore. L'Empereur était logé dans une maison voisine. Berthier, me. conduisant toujours, me fit traverser une salle dont le plancher servait de lit de camp à tous les officiers d'ordonnance, au point que nous eûmes peine à poser le pied par terre.

On ouvre la porte; la voix de l'Empereur se fait entendre : « Qui est là? » — « Sire, répond Berthier, c’est l’aide de camp du maréchal Ney qui revient de Brienne. » L'Empereur était couché tout habillé sur un canapé.

Il se leva et vint s'asseoir auprès de la table, recouverte d’un tapis vert, qui se trouvait au milieu de l’appartement; cette table supportait deux bougies. Drouot était assis tout pensif dans un coin, en face de l'entrée, et Bertrand occupait la droite : « D’où venez-vous? Qu'y at-il de nouveau?» — « Sire, Votre Majesté a ordonné de faire son logement à Brienne. Aussi en m'y rendant, j'ai cru devoir faire rétrograder une forte colonne de blessés, qui couvraient la route et qui retournaient, en les assurant que vous alliez coucher ce