Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

1814 — CAMPAGNE DE FRANCE 209

Le lendemain, 13 février, l'Empereur, informé que Blücher marchait sur Montmirail et repoussait Marmont qui lui était opposé, se dirigea en toute hâte vers ce point; il arriva, le 14, à Vauxchamps à la tête de toute sa cavalerie et de l'artillerie, qui se mirent en bataille en face de Blücher, alors plein de son succès.

Arrivé auprès de Janvilliers, village voisin de Vauxchamps, le maréchal pénétra seul, avec son état-major, dans les rues, qui venaient d’être occupées par l'ennemi, sans savoir si le village était évacué. Parvenu au milieu des habitations, le maréchal s’achemina vers une petite ruelle très étroite qu'il pensait devoir le conduire vers notre armée; le croyant en danger, je m’élançai pour marcher devant lui : tout son état-major le suivait. À un détour, je vis venir à moi un lancier que je pris pour un ennemi. Étonné, j’arrétai mon cheval : « Auriez-vous peur, Levavasseur? » cria le maréchal. » — « Non, répondis-je, c’est mon cheval. » Ayant reconnu que ce lancier était des nôtres, et, piqué du propos du prince qui avait été entendu par mes camarades, je sentis se gonfler ma poitrine. J’arrivai en maugréant sur le champ de bataille : à quelque distance devant le maréchal, se trouvait une vedetle ennemie. Je m’élançai : la vedette lâcha son coup de fusil sur moi; je fondis au galop sur elle et, l'attaquant vigoureusement à coups de sabre, je la ramenai prisonnière aux pieds de Ney. Je prouvai par là au prince et à mes cama-

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