Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

314 SOUVENIRS D'OCTAVE LEVAVASSEUR

Le même jour, je retrouvai ma batterie d'artillerie légère d’Austerlitz, et je reconnus le canonnier Lapostalet, de Belfort : « Comment? te voilà! to r..45. mon vieux brave! Tu n'as pas la croix d'honneur? Qui commande la batterie? » — « C’est le capitaine Lebeau. » — « Y a-t-il encore des canonniers d'Austerlitz? » — « Oui, il y en a encore six. » Il me les désigna. « Pars, lui dis-je, va prier Lebeau de faire à l'instant une demande de croix pour ces six canonniers, et reviens immédiatement. » Lapostalet partit et revint au moment où j'étais à table avec le maréchal; il me remit le papier que j'ouvris. Le capitaine Lebeau, pensant que la part du lion lui appartenait, se portait comme officier, en désignant pour la croix Lapostalet et plusieurs autres canonniers, qui n'étaient pas ceux d’Austerlitz. Je me lève en disant à Lapostalet : « Ce n’est pas ainsi que cette proposition doit être conçue; va dire à Lebeau que j'insiste pour qu'il porte ceux que j'ai commandés autrefois. »

Lapostalet partit de nouveau et revint bientôt avec une nouvelle proposition, sur laquelle Lebeau était toujours en tête comme officier; les noms voulus suivaient le sien. Après le dîner, le maréchal se rendit chez l'Empereur; je l’accompagnai. Chemin faisant, je lui disque je venais de rencontrer mon ancienne batterie d'artillerie d’Austerlitz; qu’elle était commandée par un officier, qui n'avait jamais rien demandé, et qu'aucun de mes braves canonniers n'avait la croix. Je le priai de