Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

18 SOUVENIRS D'OCTAVE LEVAVASSEUR

par le règlement et il m’arriva plusieurs fois, pendant la nuit, de canonner des chaloupes françaises qui avaient la maladresse de ne pas allumer leurs feux.

Pour donner une idée de l'ignorance de nos pilotes, il me suflira de raconter qu’étant à Dannes, j'eus le désir d’aller voir Calais que je ne connaissais pas. Je partis avec mon ordonnance et me rendis à Calais; je m'y liai avec des officiers du 12° régiment d'infanterie légère. J’appris que le régiment s’embarquait la nuit même sur des bateaux plats pour rejoindre Boulogne. Je me décidai à retourner avec ce régiment et prescrivis à mon ordonnance de reconduire mon cheval par la route de terre.

A deux heures du matin, accompagné des officiers, je pris place sur un bateau plat et, lancés bientôt en pleine mer, nous perdîmes de vue la côte de France, quoique le jour fût venu. Le brouillard était fort épais, l’appréhension de tomber sur la côte d'Angleterre s’empara de l’équipage. Nos bateaux formaient une petite escadre que de mauvaises manœuvres ne tardèrent pas à disperser. Tout à coup, une vigie crie : « Bâtiment anglais! » La terreur s'empare de nous. « Hissez le perroquet! » s’écrie-t-on : « Il nous gagne! n’arrivons pas! il nous gagne!... arrivons!.. arrivons! »... Dans ce moment de détresse, on jette le canon à la mer, on approche de la côte, et, au lieu de faire le circuit nécessaire