Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

LA CONJURATION BRETONNE 47

Pour n'être pas soupçonné d’émigration, il prend prétexte d'intérêts qui l’appellent à Londres 1, se fait régulièrement délivrer un passe port et s’embarque à Saint-Malo. Sa belle cousine Thérèse de Moëlien l’accompagnait ; ilemmenait, en outre, un domestique fidèle, nommé Saint-Pierre, Guillon, son perruquier, et Bossart, son valet de chambre?. Les voyageurs ne firent que toucher l'Angleterre, et, par Ostende, gagnèrent l'Allemagne; vers le 20 mai, ils arrivaient au bord du Rhin.

Coblentz était alors un endroit très gai: la ville fourmillait d’émigrés, pleins de confiance dans la fin prochaine de l'aventure révolutionnaire et ravis de leur escapade, qu'ils considéraient comme une amusante partie de campagne.

On campe dans les hôtels, au palais de l’Électeur, dans les villas au bord du fleuve, « des maisons toutes neuves et arrangées à merveille, avec les plus jolis papiers, les lits et les rideaux des fenêtres en taffetas de couleur unie ou en

document : la Rouërie partit postérieurement au 2 mai, puisqu'à cette époque il se trouvait encore à Antrain; sa rencontre avec le comte d'Artois est du 5 juin, et son retour à Paris du 20 du même mois. Il dut donc quitter la Bretagne dans la première quinzaine de mai 1791.

1. Il s'agissait, croyons-nous, de liquider la créance que le marquis possédait sur les Etats-Unis d'Amérique en récompense de ses services pendant la guerre de l'Indépendance.

2, Interrogatoire de Pierre-Claude Boujard. — Archives nationales, W, 275.