Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

VIE DE SOCIÈTÉ ET DE FAMILLE. 303

Non loin de lui, la cour grand-ducale de Weimar était considérée comme l'Athènes allemande : Gœthe et Schiller S'y rencontraient avec Benjamin Constant et Mme de Staël. Il lui eût plu de figurer à cette cour lettrée, entre les beaux esprits de la France et de l'Allemagne. Sa femme possédait à Weimar une maison, ef, au moins comme artiste, elle eût été admise à la cour. Il ne demandait pas ung situation officielle dans ce pays, mais seulement une. lettre de cabinet qui l'accréditàt comme sujet et protégé de l'empereur. Czartoryski fit la sourde oreille à sa requête.

Au commencement de 1805, n'ayant pu obtenir d'aller plaider lui-même sa cause, il fit parvenir ses doléances par Mohrenheim: celui-ci se rendait à Pétersbourg pour présenter son rapport de fin d'année sur les affaires traitées avec son concours, el sans doute aussi sur son patron. La guerre était imminente, et les Français, qui occupaient le Hanovre, pouvaient en quelques marches être à Dresde. D'Antraigues se disait las de n'avoir été récompensé d'un travail difficile que par des promesses ; il sollicitait une place, hors de la portée des armes françaises, en proportion avec ses talents et ses services, et des marques publiques de faveur qui fissent tomber et les poursuites de Bonaparte, et les accusations d'espionnage colportées contre lui. Il eût voulu, bien que n'ayant pas le grade requis de « conseiller d'État actuel », remplacer sur sa poitrine la croix de Saint-Louis dont on l'avait dépouillé par quelque cordon de Saint-Stanislas ou de Sainte-Anne : et ses craintes pour l'avenir croissaient de jour en jour, car il ne se passait guère de semaine où le bruit de la retraite de son protecteur ne parvint jusqu’à lui.

A la fin d'avril, Mohrenheim reparut à Dresde, porteur