Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

ÉTABLISSEMENT EN ANGLETERRE (1806-1801). 319

peine, on le pense bien, à faire appuyer sa requête par le gouvernement saxon. Il indiquait Londres comme la résidence qui lui convenait davantage, et cette fois il était sincère, car il en était venu à dire : « Tout plutôt que de revenir Français. » L'Angleterre était un pays dont il connaissait la langue, où il avait gardé de vieux amis, et il y sollicitait en ce moment même des lettres de denization, c'est-à-dire les privilèges d’une deminaturalisation (1). Les ministres anglais, pensait-il, étaient tout prêts à l’accueillir, à lui ménager des faeilités pour ses travaux politiques.

Czartoryski, au moment de quitter les affaires, s’efforça d'assurer après lui la situation de son fidèle et intime correspondant. Il fit autoriser d'Antraigues à s'établir en Angleterre, sauf à vivre à Londres ou dans les environs, à envoyer au ministère des mémoires sur les événements, en y joignant des comparaisons historiques, à publier des brochures et des articles dans les journaux pour éclairer l'opinion publique, à faire parvenir même directement des lettres au cabinet impérial (2). Au fond, ce qu'on lui donnait, c'était une retraite honorable et agréable, due, disait-on, à ses services. Au lieu de ce brevet de colonel qu’il attendait depuis dix ans, on lui

(1) Vansittart à d’Antraigues, 1® janvier 1806. (B. M., Add. mss. 31230, fe 123.)

(2) M. d’Antraigues serait chargé d’envoyer tons les mois, ou plus souvent s’il le pouvait, un mémoire sur la situation de l'Angleterre et un autre sur celle de l'Europe en général. De plus, M. d'Antraigues devrait fournir un mémoire sur la manière la plus convenable de relever la monarchie autrichienne. » (Gzartoryski à l’empereur Alexandre, 8/20 mars 1806. (Recueil de la Société d'histoire de Russie, t. NCII, p. 323.) — Czartoryski à d’Antraigues, 12 avril 1806 (cité dans la lettre de d’Antraigues à Roumianzov, 44 juillet 1809. — A. P.).