Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

CONCLUSION. 351

biens de sa famille, et même, s’il était possible, de jouer un rôle politique (1).

Jeune, inexpérimenté, il trouvait à Paris un roi à qui son nom rappelait les plus désagréables souvenirs. Il vint dans l'Ardèche, où il savait rencontrer encore des amitiés dévouées, et là, s’il se fit rendre par l’administration quelques biens invendus et les deux canons de parade qui gardaïent jadis la porte de la Bastide, il ne put recouvrer la fortune territoriale de son père. Il perdit les procès qu'il intenta à certaines communes, et se flatta en vain de parvenir à la députation, sans oser, peut-être sans pouvoir poser sa candidature. Dès lors, comme écrasé par la fatalité qui avait faussé la destinée de son père, il traîna çà et là une vie qui ne fut qu'une longue suite d’expédients, de maladresses et d'épreuves. Les créanciers du feu comte l’attaquèrent. Dans sa famille même, on lui opposa les déchéances légales prononcées contre son père comme émigré (2). D'autres lui disputèrent, en rappelant les circonstances du mariage clandestin célébré en 1790, la qualité d'héritier légitime : « Déboires, traverses, obstacles à tous mes desseins, même les plus justes, écrivait-il mélancoliquement dès 1818, tout m'a été suscité par des gens puissants, implacables, qui poursuivent sur le fils leur haine contre le père (3)... »

En 1893, il alla à Naples réclamer la pension dont

(1) Dumouriez à Jules d'Antraigues, 21 juillet 1816. (A.F., France, vol. 632, f° 157.)

(2) C’est ce qui résulte d’une sommation à lui faite le 5 mars 1821 par sa tante Mme de Viennois, « seule héritière de dame Marie-Jeanne-Sophie Guignard Saint-Priest », d’avoir à payer dans la huitaine la somme de 255,122 liv. 15 s. 1% d.

(3) Lettre à Teissier (sans date). (Comm. par M. Doize.)