Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

CONCLUSION. 353

même autrefois; il ne paraît pas cependant avoir profité du changement de règne. Il dut au contraire subir de ce côté des mécomptes pénibles pour son amour-propre ; car ce furent de ses mains que sortirent, par l'entremise d’une aventurière en renom, la Contemporaine, des lettres répandues d’abord à Londres, puis publiées par la Gazelte de France (1), qui montraient le roi des Français, à vingt-cinq ans de distance, animé contre la France nouvelle de toutes les passions de l’émigration. Il aurait fait, vers la même époque, la connaissance du prince Louis-Napoléon; en tout cas, après la tentative de Boulogne, craignant d’être compromis dans le procès qui suivit, il repassa en Angleterre et ne revint dans son pays qu'après la révolution de 1848. Il se lia alors à Dijon avec les notabilités bonapartistes et s'employa, en dépit de ses souvenirs de famille, à la restauration de la dynastie napoléonienne. Il s’excusait en disant que l’avènement de Napoléon III réalisait un de ses vœux les plus chers, l'union intime des nations anglaise et française. Quelques légitimistes dijonnais, par égard pour son nom, peut-être aussi par sympathie pour un ennemi de la famille d'Orléans, lui servaient une petite pension. Sous le second empire, deux compatriotes de son père se trouvèrent, par un singulier hasard, à portée de le connaître et de compatir à son infortune : l'un, Gamon, neveu du conventionnel, était venu à Dijon comme percepteur des finances; l’autre, Henri de Lagarde, fils d'un avocat de Privas, était rédacteur du journal de la préfecture. Ils rédigérent une pétition à l’empereur qui fut appuyée et présentée par un Dijonnais influent, le maré-

(1) Numéro du 18 janvier 1841