Un diplomate d'il y a cent ans : Frédéric de Gentz (1764-1832)

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duquel il avait assisté à une séance de l’Assemblée sonstituante, jamais il ne s'était occupé de ces choses qu’en amateur. Bien au contraire, c’est Gentz qui eût pu être son maitre en cette matière. Humboldt a enseigné à Gentz à regarder le monde avec une dose de scepticisme ; il a contribué à le libérer quelque peu de sa phraséologie, à l’empêcher d’être la dupe de ses propres idées, de se laisser griser par sa propre éloquence, ce à quoi le jeune Gentz ne pouvait être que trop enclin.

En effet, quelles que soient nos idées sur la Révolution française, pour que le talent de Gentz se manifestât dans toute son ampleur, il était nécessaire de le débarrasser d’un faux enthousiasme de jeunesse qu’on trouve dans ses premiers écrits ; sa véritable force oratoire ne pouvait qu’y gagner. À cela Humboldt a fortement contribué. C’est peu ou c’est beaud'ailleurs postérieurs à la période où ils se rencontraient souvent à Berlin: Ideen über Staatsverfassung durch die francüsische Konstitution veranlasst (August 1791), publié dans la Berlinische Monatsschrift, de janvier 1792.

Idee zu einem Versuch über die Grenzen der Wirksamleil. des Staats. 1792; publié bien plus tard.

Ces articles furent bien plutôt, au moins le premier, inspirés par Gentz, mais ils n'eurent pour ainsi dire aucune influence sur lui. Il y a un moment vers la fin de 1791 et le commencement de 1792 où Humboldt, dont l'évolution politique a été en quelque sorte opposée à celle de son ami, et Gentz ont dû se sencontrer dans leurs doutes sur la Révolution française. Puis ils ont pris chacun des directions contraires : le premier s'en-

ferma dans un indifférentisme absolu, le second devint l’adversaire acharné de cette même Révolution.