Un diplomate d'il y a cent ans : Frédéric de Gentz (1764-1832)

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ment il comprend l’équilibre. Bien loin de multiplier les conflits, il doit servir à les prévenir. Et là où Makintosh voit un vice de la constitution anglaise, Gentz voit justement un de ses grands avantages. On entend par équilibre cette action réciproque latente, dont l’effet est de régler l’évolution de la politique intérieure d’un pays, tout en évitant de part et d'autre les chocs et les heurts.

Par conséquent, en 1792, Gentz avait déjà énoncé le principe de l’équilibre, et c'était là-dessus que s’appuyaient ses idées antirévolutionnaires. Il n’avait cependant pas tiré de ce principe toutes les conséquences qu'on en pouvait tirer. Ce n’est qu’en 1795 qu’il le confrontera avec la théorie de Montesquieu, et l’appliquera à la séparation des pouvoirs dans son article sur les systèmes constitutionnels ‘.

Toutes les idées de Gentz en matière de politique intérieure s’expliquent par cette conception de léquilibre, aussi bien son admiration pour la constitution anglaise que son antipathie pour la Révolution française ?.

En Angleterre, en effet, Gentz voit partout l'équilibre: équilibre entre les différents pouvoirs qui

1. Neue deutsche Monatsschrift, octobre 1795. Article déjà cité.

2. C'est pour que l'équilibre puisse s’établir entre les opinions contraires que, dans son mémoire de 1797 au roi FrédéricGuillaume II, il réclame pour la Prusse une complète liberté de la presse.