Un diplomate d'il y a cent ans : Frédéric de Gentz (1764-1832)

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raison‘, c’est seulement une vraie nécessité inéluctable qui peut et qui doit fonder et justifier la résolution de faire la guerre. Toute autre théorie est non seulement nuisible, mais criminelle.

« Empèêcher la guerre, tel doit être le but de toutes les mesures politiques, de tous les efforts militaires, de toute la sagesse diplomatique. A cette fin la plus élevée entre toutes doivent travailler la puissance et la sagesse inlassablement unies *.»

Ces mots étonnent dans la bouche de Gentz qui, après Burke, s’est déjà beaucoup inquiété de la répereussion de la Révolution française dans les différents pays d'Europe; ils étonnent surtout en 1797, alors que le Directoire est maître de la rive gauche du Rhin, qu’il a conquis lItalie. Gentz ne voit-il done pas la Révolution se répandre en dehors de la France, et alors comment expliquer de tels conseils ? On peut dire que son raisonnement se rapporte seulement à la Prusse. Mais il est justement trop cosmopolite pour parler, même dans un mémoire à son roi, en nationaliste prussien. Il voit fort bien que si

1. Ausgewählte Werke. Ed. Weick. V, p. 7, Gentz dit exactement: «Nur negativer Gewinn, nur Abwendung grôüsserer Uebel, der wenigen noch grüsseren, welche die Vernunft anerkennt, nur wahre, eiserne Notwendigkeit, künnen und müssen den Entschluss zum Kriege begründen und rechtfertigen. Jede andere Lehre ist nicht bloss verderblich, sondern frevelhaft, »

2. Ibid., p. 7.