Un mémoire inédit de Francis d'Ivernois sur la situation politique à Genève audébut de 1791 ....
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une force pécuniaire qui sans cela tendrait sans cesse à faire jalouser ses opérations et frauder ses revenus. Si l'on ajoute à cela des élections croisées réunies à une amovibilité croisée dans le Grand Conseil, on verrait le peuple jouir du droit d'élire, quoique ce fussent ses magistrats qui l'exerceraient dans le fait. Tout au moins ce genre d'élection préviendrait-il les ligues, en empéchant de conférer les emplois soit aux favoris d’un parti, soit aux adversaires de l'autre. Ajoutons que le parti populaire serait tranquille sur [le] Corps inspecteur, parce que la loi le déclarerait amovible et quoique cette amovibilité n'existerait réellement bien moins dans le fait que dans l'imagination des gouvernants et des gouvernés. [l y aurait enfin entre ceux-ci des moyens de rapprochement et des motifs de fréquentation qui solliciteraient le support. conduiraient à l’indulgence et effaceraient les fâcheuses traces de l'inégalité des richesses. Sans doute qu'il ÿauraitencore quelques distinctions entre les différentes classes, mais elles ne seraient plus ni choquantes, ni si nombreuses. Le terme en serait si prochain pour tous les individus qu'il leur serait toujours plus facile de l'attendre que de renverser l'institution. Enfin elles s'engraineraient si bien les unes dans les autres qu'elles seraient. pour ainsi dire, inapperçues et ne formeraient qu'un faisceau. Genève présenterait enfin l'image d'une démocratie parfaitement tempérée, de la seule espèce de démocratie qui puisse convenir à un peuple éclairé, celle dont le peuple paraît jouir de toute l'autorité et où il a consenti à en enchainer lui même l'exercice de manière à s'éviter l'obligation d'y avoir recours, celle où les égards du peuple sont obtenus et non exigés et où l'on bride les ligues