À la recherche de la fortune du duc d'Orléans (1793-1794) : lettres inédites du général Montesquiou à Francis d'Ivernois

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seulement de constater la possession. Quand on n’aura plus qu’à discuter la remise, les légistes deviendront nécessaires, et la marche que vous tracez sera suivie sans précipitation et sans impatience.

Ce que je vois le plus clairement, c’est que vous croyez intéressant pour vous de ne pas paraître vous mêler de cette affaire. Je concois à merveille vos motifs, et un heureux hasard m'a fourni le moyen de vous mettre à votre aise en conservant cependant le secours de vos lumières et le fruit de vos recherches. Un Français très estimable, que je connais beaucoup, et qui est très instruit en affaires, s’est depuis peu échappé de France et va passer en Angleterre, où il a des amis recommandables. Je l'ai vu, il a déjà tous les passeports de toutes les puissances belligérantes, et dans quinze jours il partira pour Londres. Il fait le plus grand cas de M. Chabos, il sera fort aise de lui rendre service, et il ne demande pas mieux que de se consacrer entièrement à cette affaire. Il se nomme M. Duval'; c'est un homme de très bonne compagnie. Je lui remettrai une lettre pour vous. Vous pourrez l’instruire du point où sont les choses, lui laisser à faire toutes les démarches ostensibles, et je ne vous demande ensuite que de l'aider, de causer avec lui, et de ne pas vous séparer de cette affaire. J'espère que par là je remplirai vos vues, et je bénis le ciel de ce que cette rencontre coïncide exactement avec ce que vous me mandez au sujet des inconvénients pour vous d’une mission que votre amitié pour moi vous avait toute seule fait ac-

1. D'après les indications des leltres suivantes, ce (« Duval » ne peut être que Jean-Nicolas Démeunier, né le 15 mars 1757; avant la Révolution, censeur royal et secrétaire du comte de Provence, élu en 1789 député du Tiers-Etat de la ville de Paris, secrétaire puis président de la Constituante. A l’expiration de son mandat, nommé un des administrateurs de la ville de Paris, il démissionna lors de la rentrée de Pétion à l'Hôtel de Ville, et émigra aux EtatsUnis, d’où il revint en l’an IV. Il mourut comte de l'Empire, grand officier de la légion d'honneur, le 7 février 1814, — C'est entre le 19 juillet 1792 et son embarquement pour les Etats-Unis que Démeunier a dû s'occuper des affaires du duc d'Orléans. — ©. K.