Bitef

Notre jeune Shakespeare lut celui-ci, s'emballa, écrivit sa pièce. Ainsi, les belles histoires font leur chemin. Roméo et Juliette ont-ils vraiment existé? Les historiens n'en savent trop rien. Quoi qu'il en soit, si vous allez à Vérone, on vous y montrera le balcon du haut du quel Juliette se penchait vers Roméo. Vous visiterez aussi le tombeau vide de Juliette; de grandes foules, où l'on compte bon nombre de jeunes amoureux, y vont en pèlerinage et y apportent des fleurs. Peu importe l'avis des histoirens. Roméo et Juliette ont vécu. Ils continuent à vivre dans bien des coeurs.

romèo et • • C'est une iiilietter ** histoires du monde. Et bien sûr une histoire i d'amour. Toute belle histoire est une V histoire d'amour. On ne se lasse pas I de la raconter. Béjart en a fait un ballet. Le cinéma l'a transportée dans le quartier portoricain de New-York, et ce fut West Side Story. »Quinze ans, ô Roméo, l'âge de Juliette!«. Le vers fameux d'Alfred de Musset est faux. Juliette n'a pas quinze ans ; elle est tout juste à la veille de son quatorzième anniversaire. C'est l'histoire d'êtres très jeunes qui, pour la première fois, sont illuminés par l'amour. Et cet amour est si grand, si merveilleux, si absolu, qu'ils en meurent. Car à côté de l'amour, il y a la haine; celle que se portent l'une à l'autre ces deux familles, ces deux factions rivales qui déchirent Vérone, les Capulet et les Montaigu. Ces Capulet et ces Montaigu, comme nous les connaissons bien! Ce sont les éternels violents: les politiques furieux, ceux qui tiennent leurs idées pour la vérité absolue et pour qui l'adversaire est tout juste bon à être massacré, écrasé, les goinfres du pouvoir et de la tyrannie. En notre monde d'aujourd'hui, hélés ! ils sont légion; Khmers Rouges ou Brigades Rouges, les Videla et les Pinochet, les bourreaux des chambres de torture, des camps de mort, des asiles psychiatriques. Contre ces imbéciles et ces tarés, Roméo et Juliette osent dire simplement : »Faisons l'amour, pas la guerre /« Et ils font l'amour ardemment ; ils voudraient que cet amour se répande autour d'eux comme un éblouissement. On ne le leur pardonnera pas. C'est une histoire qui finit mal. C'est une histore qui finit bien. Puisqu'elle proclame le triomphe de l'amour sur toutes les démences et toutes les méchancetés. Est-il bien nécessaire de la raconter, cette histoire? Soit, résumons-la en quelques mots: Donc à Vérone, les Capulet haïssent les Montaignu et les Montaigu haïssent les Capulet. Un soir, par plaisanterie, le jeune Roméo Montaigu imagine de se glisser, avec quelques amis, au bal masqué qu'organisent chez eux les Capulet: sous le masque, on ne le reconnaîtra pas. Là, il rencontre la très jeune fille de la maison, Juliette: c'est son premier bal.

Les jeunes gens dansent ensemble, s’écartent en un endroit discret; les masques tombent; ils échangent leur premier baiser. Désormais, pour toute leur vie, ils seront l’un à Vautre. Roméo confie son amour au sage Frère Laurent. Cet excellent homme se dit que l’union de ces deux jeunes gens pourrait amener la réconciliation de leurs familles. Il accepte donc de les marier secrètement. Hélàs ! Tybalt, le cousin de Juliette, un furieux, a appris la présence de Roméo au bal. Il erre par la ville, cherchant à se venger de ce qu’il considère comme un sanglant affront. C’est sur un camarade de Roméo que va d’abord se porter son courroux: Mercutio, un joyeux garçon, un délicieux poète. Il le provoque et le tue traîtreusement. A son tour, en combat loyal, Roméo tue Tybalt. Apprenant ce double meurtre, le Prince de Vérone, le bannit de la ville, sous peine de mort. Roméo a à peine le temps de connaître sa nuit de noces dans les bras de Juliette. Au matin, il doit fuir. Les Capulet veulent marier leur fille avec un membre de la famille, le beau et charmant Paris ; et ils sont décidés à hâter les choses. Que faire? Frère Laurent trouve le moyen d’éviter cette catastrophe. Il fournit à Juliette un puissant narcotique qui la fera passer pour morte. Selon la coutume, on exposera le corps de la jeune fille dans le veste caveau des Capulet. Roméo, prévenu du subterfuge par un messager, viendra, de nuit, chercher sa jeune femme dans le tombeau où elle repose, et cela juste au moment où elle doit se réveiller. Ce beau projet s’accomplit, à un détail près : le messager envoyé par Frère Laurent n’arrive pas à joindre Roméo. Informé de la mort de Juliette, le jeune homme arrive au cimetière. Il j trouve le pauvre Paris, venu pleurer sa fiancée; provoqué par lui, il est bien obligé de le tuer. Puis, il s’empoisonne au pied de ce qu’il croit être le cadavre de sa bien-aimée. Juliette se réveille, pour découvrir à côté d’elle le corps sans vie de Roméo. Elle ne veut pas lui survivre. D’un coup de poignard, elle se tue. Alertées les deux familles sont accourues au cimetière. Trop tard! A l’appel du Prince, elles ne peuvent que se réconcilier et unir leurs larmes, devant les dépouilles de leurs enfants. Il y a tout cela dans Romeo et Juliette; il y a bien d’autres choses encore. Ne fut-ce que la folle improvisation de Mercutio sur la Reine Mab, cette fée pas plus grosse que le petit doigt, qui vient souffler dans le nez des dormeurs les rêves les plus extravagants. Ou encore le personnage de la nourrice de Juliette, intarissable commère, bavarde comme une crécelle, et sotte de la façon la plus réjouissante qui soit. Mais tout bienvenu, tout divertissant que cela puisse être, ce n’est qu’accessoire. La grande affaire, c’est l’amour. Comme l’a dit l’un des commentateurs de l’oeuvre, René Lalou; »Pour Juliette, il aura suffi que Roméo paraisse; elle saura qu’entre cet amour et la mort, il n’est point de troisième alternative. Désormais, ils obéiront à l’amour comme à une irrésistible vocation. Tout ce qu'ils sont, tout ce qu’ils peuvent, ils le consacrent à ce culte. Un conseil, ils le repoussent farouchement ou le suivent avec une émouvante