Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

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sentiment de lImpératrice,il n’est pas douteux que celleci ait souvent influé sur les appréciations du journal.

La chute de la Bastille qui allait ouvrir à la France une ère nouvelle, se répereuta donc à Pétersbourg, et fut le prélude de la politique de réaction qu'inaugura Catherine.

Ségur, dans ses Mémoires, dit que « la chute de cette prison d’Etat et le premier triomphe d'une liberté oraSeuse » souleyèrent à Pétersbourg un enthousiasme indescriptible « parmi les négociants, les marchands, les bourgeois et quelques jeunes gens d’une classe élevée ». « Français, Russes, Danois, Allemands, Anglais, Hollandais, tous, dans les rues, dit-il, se félicitaient, s'embrassaient, comme si on les eut délivrés d’une chaîne trop lourde qui pesât sur eux. » Ségur avoue que cet enthousiasme fut de très courte durée, et que « la crainte de déplaire à lImpératrice arrêta bientôt ce premier mouvement. Pétersbourg n'était pas un théâtre sur lequel on püt sans danger faire étalage de tels sentiments. »

Cet accès d’enthousiasme rapporté par Ségur n'est relaté par aucun document russe de l'époque. Il serait peut-être imprudent de se fier complètement à Ségur, qui sous l'influence de son parent La Favette avait salué de son approbation « la chute du symbole des tyrans. » Nous savons que Catherine, qui se faisait montrer la correspondance des ambassadeurs accrédités à sa cour, surprit, au moment de la prise de la Bastille, une lettre de Ségur à La Fayette, et fut fort étonnée d’y trouver ce passage qu'elle fit copier : «Je vous félicite de cette