Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

L'« ÉGRILLARDE » EN FRANCE 65

heureuse révolution qu'avait amenée l’impéritie de quelques ministres, le poids des impôts et l'ambition irritée des parlements. Je la craignais, parce qu'elle aurait détruit la France, si un Concours presque miraeuleux de circonstances n'avait fait évanouir tous les obstacles qui devaient vous arrèler dans vos opérations. » Catherine fut indignée, et s’écria : « Comment un ministre du roi peut-il écrire de la sorte ? »

Ségur eut-il réellement l'illusion de croire que la chute de la Bastille du despotisme était la fin du mouvement révolutionnaire ? Catherine, plus sagace en la circonstance, n’y vit qu'un commencement, et fit part à son entourage des grandes calamités qu’elle prévoyait. Il serait donc difficile d'admettre que Pétersbourg salua notre mouvement d’émancipation sociale par l’accueil enthousiaste que lui firent l'Italie et l'Allemagne dans certaines de leurs parties.

Pétersbourg et Moscou avaient pour toute bourgeoisie les industriels et les commerçants ; or, ceux-ci appartenaient presque exclusivement à la colonie étrangère. Ilest bien possible que des étrangers établis à Pétersbourg aient manifesté leur joie de ce triomphe de la liberté, etaient félicité l'ambassadeur du roi de France. Il se peut mème que quelques esprits frondeurs russes se soient associés à ces manifestations ; cela est d'autant plus vraisemblable que Genet, qui après Ségur occupa à Pétersbourg les fonctions de chargé d’affaires de France, reçut lui aussi, en 1790, 1791 et 1792, des souhails pour leprompt épanouissement des idées nouvelles. Mais cette effervescence n'eut aucun caractère de généralité,