Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

L'&« ÉGRILLARDE » EN FRANCE 107

C’est que, depuis le jour fameux (4) où la Diète de Pologne, malgré la violente opposition des représentants du parti russe, avait voté l’hérédité du trône, supprimé le liberum veto, accordé au roi un droit de veto, et établi une constitution qui détruisait le principe même de l’anarchie, les affaires de Pologne, dans l'esprit de Catherine, s'étaient nécessairement confondues avec celles de France, et avaient pris le pas sur elles. « La Révolution de Pologne allait, pour le malheur des Polonais, se rattacher à toutes les affaires de l’Europe et se mêler à la Révolution française. » (2).

La constitution polonaise contrariait aussi les projets de la‘ Prusse et de l’Autriche également intéressées à l'affaiblissement du royaume de Stanislas-Anguste. Mais la Russie, qui voulait la disparition — à son profit — de la Pologne, était la plus atteinte. Pendant la guerre contre les Tures et contre les Suédois, Catherine avait dû négliger la Pologne : mais l’arrière-pensée d'y revenir aussitôt qu'une occasion favorable se présenterait, ne l'avait pas quittée. La révolution de Pologne réveilla ses convoitises, et elle résolut d'en finir. Elle avait fait la paix avec la Suède. Elle jeta aussitôt les bases d’une entente avec la Turquie ; modérant ses prétentions, elle se contenta d'Otchakof avec la ligne du Dniester. En un mot, abandonnant momentanément le fameux projet grec, elle se tourne vers Varsovie, se préparant à consacrer toutes ses forces à l’affaire polonaise. Autant

(4) Le 3 mai 1791. (2) M. Albert Sorel.