Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

128 CATHERINE II ET LA RÉVOLUTION

nous relevons dans sa correspondance peu de mots pittoresques ou blasphématoires contre la philosophie.

Ainsi, le 5 décembre 1793, au moment où l’œuvre terroriste est dans son plein épanouissement, elle tiendra à Grimm ce langage relativement mesuré : « Les philosophes français qu'on croit avoir préparé la Révolution française, peut-être ne se sont trompés que dans une seule chose, c'est qu'ils croyaient prêcher à desgens auxquels ils supposaientuncœur bon et des volontésenconséquence, et qu’au lieu de cela les procureurs, les avocats et tous les scélérats, se sont couverts de leurs principes, pour, sous ce manteau qu'ils ont bientôt secoué, faire tout ce que la scélératesse la plus exécrable ait jamais employé de plus horrible, et cette canaille parisienne, subjuguée par les crimes les plus atroces, ose se dire libre, tandis qu’elle n’a jamais éprouvé de tyrannie ni plus cruelle, ni plus absurde. » 4 l'heure où elle est le plus inexorable pour les régicides, l’ancienne libérale de 1767 a quelques excuses pour ceux qu’elle a jadis encensés.

Comme nous sommes loin du langage du grand Frédéric! Celui-ci, sans embarras, a fait sentir aux philosophes avec lesquels il étaiten correspondance, lemépris qu'il avait pour eux: la grande Sémiramis du Nord a des indulgences pour les philosophes qui ont dispara ou

‘avec lesquels elle n’est plus en relations. Elle a le respect du souvenir.

Mais en 1793, la réaction peut seule prévaloir en Russie. Aussi y a-t-il lieu de remarquer cette bizarrerie : Avant la Révolution, alors que la philosophie fran-