Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

132 CATHERINE II ET LA RÉVOLUTION

trouva les deux portraits tout bonnement détestables, et ellele dit à Grimm: «L’émule d’Angélique Kauffmann pour son premier essai, commence à peindre les grandes-duchesses Alexandrine et Hélène ; la première a une figure noble, intéressante, lair d'une reine ; la seconde est une beauté parfaite avecune mine de sainte nitouche. Madame Lebrun vous accroupit ces deux figures-là sur un canapé, tord le cou à la cadette, leur donne l'air de deux petites vilaines savoyardes coiffées en bacchantes, avec des grappes deraisin, et les habille de tuniqués gros rouge ét violette; en un mot, nonseulement la ressemblance est manquée, mais encore les deux sœurs sont tellement défigurées, qu'il y a des gens qui demandent laquelle est l’ainée, laquelle la cadette. Les partisans de Mme Lebrun élèvent cela aux nues, mais à monavisc'est bien mauvais, parce qu'il n'y a dans ce tableau-portrait ni ressemblance, ni goût, ni noblesse, et qu’il faut avoir le sens bouché pour manquer ainsi son sujet, en ayant surtout un pareil devant les yeux : il fallait copier dame nature et non pas inventer des attitudes de singe. » (1) Le 18 décembre elle reprend : « Rien de plus vilain que le prétendu portrait d'Alexandrine et d'Hélène : ce sont deux singes accroupis qui grimacent à côté l’un de lautre.… Elles ont l’air de deux filles, et puis C’est tout. »

Et ce réquisitoire sert de prétexte à Catherine pour dire qu'il n'en était pas ainsi de la peinture en France du temps de Louis XIV. En art comme en littérature, l'élève des philosophes qu’elle a reniés est demeurée fidèle au siècle du grand roi.

4) Lettre à Grimm du 8 novembre 1795.