Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

L'« ÉGRILLARDE » EN FRANCE 153

L'année 1793 pouvait-elle se passer sans quelque nouvelle crise de Catherine contre les révolutionnaires ? Le 19 novembre elle conspue « les scélérats régicides qui ont usurpé le pouvoir en France et qui en font un vaste désert, habité par les animaux les plus féroces qui aient jamais souillé la terre. » Et le 6 décembre: « Ils ne savent que piller ettuer, mais ils tueront tant qu'ils seront exterminés: il est vrai que cela ne réparera rien et ne préservera que l'avenir. » L'année suivante elle écrira à sonamhassadeur à Berlin que les Français sont des « brigands » auxquels il ne faut pas des alliés ou des amis, mais auxquels suffisent des complices et des victimes.

Le mépris qu’elle ressent pour les sans-culottes et les régicides s'étend à tout ce qui porte un nom français. La France de 1793 n’est pas en odeur de sainteté en Russie. Autant l’Impératrice a eu à cœur, jadis, d'attirer nos compatriotes, autant à cette heure elle les réprouve et les éloigne. « Chez nous, a-t-elle écrit à Grimm il y y a déjà un an, on n'admet plus si vite des Français : au moins faut-il qu’ils passent la quarantaine politique. » (1) Des Émigrés eux-mêmes elle dira que s'ils veulent venir en Russie, ils devront changer leur allure et leur langage, sans quoi elle les priera de s’en retourner, Quelques Français servent dans ses armées ; elle a accepté les services de Richelieu, de Langeron,de Roger de Damas, du marquis de Lambert et de quelques autres; mais ce ne sont que des exceptions ; elle ne les

(1) Lettré du 9 mai 1792.