Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

L'« ÉGRILLARDE » EN FRANCE 203

donne une demi-douzaine de soufflets et lui met toute la figure en sang. Cet officier doit épouser la coquine et est une de ces viles créatures du comte Zoubof. On le renvoya sans aucune punition au régiment, et on Ôta à M. Doubiansky les privilèges du page de la chambre. »

Rostoptchine a beau avoir le caractère fougueux et inquiet, on n’invente pas des faits de cette nature; il faut donc y voir une part de vérité. Aussi, comme nous le comprenons, quand, en villégiature à Tsarskoé-Sélo pendant l’été de 1794, il va passer quelques jours en ville et s’écrie : «Il n’est pas désagréable de quitter la cour pour quelques jours. C’est un séjour trop fatigant si on est étranger aux intrigues. »

Mais ce n’est pas à la cour seulement que s’'étalent les scandales et dans l'administration que règnent les abus ; ils sont partout, et c'est peut-être parce que la société elle-même offre le spectacle d’un déplorable affaissement des mœurs.Le croquis que Rostotpchine nous en trace en mai 1796 est curieux et prouve bien que la noblesse russe n'avait rien à apprendre du contact des Émigrés : «Nos femmes qui donnent le ton en ville sont devenues folles ; c'est Mandini, un chanteur de l'opéra- . bouffe, qui les a portées à l’extravagance la plus complète. Cet histrion est l’objet de leur querelle, de leur jalousie et de leur bonheur. On porte les devises qu’il distribue, et je vous citerai celle de Mme Divof: « Sempre Pazza. » Rien de plus drôle que de voir la princesse Dolgorouky, hors d’elle-mème, applaudir toute seule, et au fond de sa loge crier des bravo et des fora; une