Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

D+ CATHERINE II ET LA RÉVOLUTION

qui voyaient aussi loin que Forster étaient légion. Le réveil des peuples ne faisait plus doute pour bon nombre d'esprits perspicaces, pour tous ceux qui suivaient avec discernement le mouvement des idées.

Mais il n'en était pas ainsi en Russie. La civilisation occidentale y avail fait, il est v'ai, son entrée, mais elle n’y avait encore marqué aucune empreinte; la Révolution y surprit tout le monde, si ce n’est peut-être un pètit nombre d'hommes passés par.Paris où ils avaient acquis l'intelligence du mouvement qui se préparait, L’Impératrice, malgré ses origines allemandes, n’était pas mieux renseignée que son entourage russe : « Je ne suis pas de l'avis de ceux qui croient que nous touchons à une grande révolution, » écrit-elle à Grimm le 19 avril 1788. [Il est vrai que dans une lettre du 3 septembre 1794 elle se vantera d’avoir « prédit au prince de Nassau et à quantité d’autres, quatre ans d'avance, ce qui est arrivé à Louis XVL. » D’un autre côté, d'après le journal de Khrapovitski, à la date du 16 septembre 1789, elle se serait écriée : «Ils sont capables de pendre leur roi à la lanterne, c’est affreux ! » Et le 21 octobre de la mème année : « Il aura le sort de Charles 1%. »

La prédiction de ce dénouement n’a rien de bien extraordinaire. À partir de 1789 elle est sur bien des Ièvres. Le 10 novembre, le prince de Ligne n’écrit-il pas à Kaunitz que Louis XVI est sur le chemin de l’échafaud ?

Il ressort de ces citations caractéristiques que Catherine n'avait en 1788 aucune vision du grand mouvement