Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

L'« ÉGRILLARDE » EN FRANCE 35

qui se préparait. Au contraire, dès septembre 1789, elle fait allusion aux plus grosses calamités.

Pourquoi ee changement en si peu de temps ? Il faut l’attribuer à la prise de la Bastille. Nous savons, en effet, que ce fut la chute de la prison d'Etat qui donna l'éveil et l’alarme à l’Europe. Avant le 14 juillet Catherine avait des répugnances pour le régime que semblaiént annoncer les premiers actes de l’Assemblée constituante ; après le 14 juillet ces répugnances se changèrent en une hostilité déclarée. Aussi est-ce à partir de 1789 que Catherine rejeta tout son passé libéral, et se lança dans la voie de la répression à outrance. Malgré tout son génie, la grande Impératrice n'eut avant 1789 aucune idée de l’importance du bouleversement qui s’annonçait. Elle se méprit plus tard sur la portée des tragiques journées de la Révolution et se trompa entièrement sur les moyens de lenrayer. Si elle ne saisit pas le but de la Révolution, c’est qu'elle n'en avait pas saisi les causes.

Non seulement elle’ ne vit pas le désaccord s’accentuant tous les jours entre la royauté et la nation ; elle ne se demanda mème pas s’il pouvait exister un désaccord. Pour elle la nation n’existait pas ; les délégués de la nation ne représentaient rien; ils étaient « l'hydre aux 1200 têtes. » À ses yeux il n’est pas d'autre pouvoir que le pouvoir absolu, et nul ne saurait porter une main sacrilège sur les prérogatives royales. Le despotisme est la seule forme de gouvernement, et il serait parfait s’il voulait être éclairé. Le règne de la « tolérance » et