Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

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pendance américaine. Mais elle n'aime pas Franklin. Dès 1778 elle l’avait fait dissuader par Grimm d’entreprendre le voyage de Russie, et la joie que la société française temoigne à la jeune République d'Amérique lui parait inquiétante. Catherine n’augure rien de bon de cet engouement.

Lorsque Necker dont elle avait souhaité l’avénement au pouvoir se prononça pour le doublement du tiers, l’Impératrice, ignorante des conséquences qu'allait entrainer cette mesure, l'avait louée sans hésiter. Louis XVI, dit-elle, y gagnera la faveur publique et deviendra aussi populaire qu'Henri IV. Si Catherine marqua un certain dépit de la réunion des Etats-Généraux, ce premier mouvement ne dura pas, et les premiers grands actes de la représentation nationale, telleserment du Jeu de Paume, passèrent assez inaperçus à Pétersbourg. Certes, la Tsarine s’inquiétait de la « fermentation » de plus en plus grande des esprits en France, et elle en prévoyait de grandes calamités. Mais c’est la prise de la Bastille qui lui donna l'alarme.

Avant le 14 juillet 4789 ses préoccupations ont un but intéressé. Sa politique attend de la France un rapprochement qu'elle recherche. Le comte de Ségur, qui est arrivé à Pétersbourg en 1785 ne s’est pas contenté du rôle effacé de ses prédécesseurs ; il a su plaire à l’Impératrice, et il a défendu avec une rare intelligence les intérèts français en Russie; il a été secondé par Louis XVI dont l'attitude vis à vis de la Tsarine est bien différente de celle de Louis XV ; une entente a été esquissée, qui pourra voir le jour si la France échappe à la crise